- Un whisky coca, s’il vous plait. Avec des glaçons.

Un whisky coca, quoi de mieux pour me remonter le moral. Certes je n’ai que 19 ans, mais au B’WELL coffee, on me servait à chaque fois. Il faut dire que je suis plutôt une habituée. Le genre de personne qu’on retrouve tous les soirs, assise au bar, buvant sans compter, seule et observant la vie des gens autour. Tout ça, c’est moi. Seule, ça c’est sur je le suis souvent. La plupart du temps même. La compagnie des gens, ce n’est pas pour moi. Toujours à se plaindre, à créer des histoires : « Mais machin a osé coucher avec mon mec ! Tu te rends compte ?! La garce quoi ! ». Oui je me rends compte, et ça me passe carrément par-dessus la tête. Sans vouloir jouer la fille mature pour son âge, les trucs de filles ce n’est pas mon genre. Vouloir bien s’habiller et se maquiller, je le fais, comme la plupart des gens, sauf ceux qui en ont rien à foutre et qui prétende que la beauté vient de l’intérieur. Bullshit ! Je suis une femme, j’ai des courbes, des atouts, je me dois d’en faire profiter tout le monde, n’est-ce pas ? De nos jours, se mettre en valeur équivaut à se tenir sur les trottoirs vers deux heures du matin. Vous avez enfin remarqué, je me plains, je suis le chiclé du pilier de bar, et il n’est même pas encore quatre heure de l’après-midi. Mais je ne le nie pas, j’aime boire. Je l’avoue, pas comme certaines filles qui ne « boivent qu’en soirée » et qui rentrent chez elles après le lycée ou le travail et qui piquent une bière à leur père dans le frigo. En parlant de soirée, ça me manque. Ca fait longtemps que je ne me suis pas réveillée en ayant oublié ce que j’ai fais la veille, sans me rendre compte que je suis chez quelqu’un que je ne connais pas, ni où sont mes affaires. Ca c’est la belle vie, de mon point de vue bien sur. Chacun pense ce qu’il veut. Comme d’habitude, je faisais claquer mes ongles sur le comptoir, en attendant ma boisson, en signe de lassitude et d’attente. Je ne savais pas où était la serveuse, ni laquelle était de service aujourd’hui. Tabatha, était celle qui me voyait le plus souvent, qui connaissait le mieux mes goûts, et qui me faisait aussi souvent des « cadeaux de la maison ». C’est aussi, une « amie ». J’ai plutôt du mal à prononcer ce mot, il faut dire que je n’en ai pas beaucoup. On est solitaire où on ne l’est pas. Mais des fois, même si c’est votre caractère, le destin vous joue des tours, et vous vous retrouvez avec une amie. Lexie, Gabrielle Rogers, avec une amie, ironique n’est-ce pas ? Ne prenant pas mon mal en patience, je pris une Marlboro dans mon sac, et parti la fumer sur le perron. Le café était plutôt vide à cette heure, les étudiants n’ayant pas encore quitter les cours. Un petit claquement de doigt, et elle s’alluma. Je savourais chaque taffe avec plaisir, la fumée entrant dans mes poumons, la mort infiltrant mon corps. La vie est trop courte pour se refuser autant de plaisir. Tout n’était que plaisir pour moi, la magie, la cigarette, l’alcool, la marijuana, l’Esprit du Diable, … Quand on a connu la mort, on n’économise pas pour sa retraite, on ne regarde pas la vie passer devant soi, on agit, on profite, on vit. Une fois ma cigarette finie, je rentrais dans le café. Je parti me rassoir au comptoir. Tabatha apparu enfin, avec mon whisky !

- T’en a mis du temps ! Une plombe pour un simple whisky !

J’avais beau éprouver de l’affection pour elle, le client est roi. Et si le client a envie de se plaindre, il peut ! Je la regardait avec un grand sourire narquois, sirotant mon verre. La journée n’avait pas été de tout repos, faire usage de la magie, ça fatigue parfois. Le manoir n’est plus si jeune, et avoir de l’eau chaude le matin, c’est une vraie galère. Imaginez devoir faire chauffer avec vos mains, une chaudière qui chauffe tout le manoir ! Sans compter qu’on en a besoin également pour le café. Et oui, le matin je ne commence pas ma journée avec un shoot de vodka, mais bien par une bonne tasse de café. Une journée sans café, c’est une mauvaise journée, vous le saurez à l’avance !

« Ouais, je sais mais je suis toute seule avec l'inventaire aujourd'hui fallait que je compte mes pailles moi. Tiens j'ai pensé à toi tout à l'heure, j'ai fais des brownies au chocolat sers toi, comme d'habitude c'est la maison qui régale, même pour ta consommation. On ne change pas les habitudes hein ? »

- Du calme la tornade ! Tu veux un peu d’aide pour ton inventaire peut-être ? Si tu vois ce que je veux dire !

Je lui fis mon plus beau sourire et lui lança un regard malicieux. Tout serait beaucoup plus simple si les sorciers se laissaient un peu plus aller. Le fait de confiner la magie en eux afin que personne ne le découvre, ne donne pas la pleine liberté dont leurs pouvoirs ont besoin pour être à leur maximum. Mais la peur d’être mis à nu règne, et on ne peut rien y faire. On me reproche souvent de ne pas être discrète, mais quelques fois, la magie prend le dessus sur mes émotions et ma raison, et s’échappe, faisant quelques dégâts. Parfois, c’est volontaire, et j’aime ça. Pour l’instant, aucun humain de la ville n’est venu me voir en me demandant pourquoi je change autant de fois de couleur de cheveux, passant du blond au brun en un weekend, ils doivent se persuader que j’ai un bon coiffeur. C’est un des avantages à être une sorcière, tu peux te fourrer dans les pires pétrins, le pouvoir inné de persuasion sera toujours le vainqueur.

- Des brownies ? Merci ! Arrête de dire ça, les gens vont croire que je n’ai pas les moyens …

Je ria. Impossible que les gens du coin pensent ça. Après tout, je suis Lexie Gabrielle Rogers. Ok, je vais arrêter le petit speech de la fille prétentieuse. Je regardais autour de moi, toujours personne dans le café, sauf un homme de la quarantaine qui buvait son café en lisant un journal : cliché. J’aurais aimé un jour pouvoir lire dans les pensées des gens. Peut-être que l’on peut développer cela, je devrais faire quelques recherches dans mon grimoire plus tard dans la journée. Si c’est possible, je pourrais enfin savoir la plupart des secrets que cachent les habitants de Coventry, car des secrets, il y en a à foison ! Que vous soyez au café, ou dans la rue, posez vous quelques instants et regardez autour de vous. Tout le monde discute, sourit, rit. Mais ça sonne faux. Regardez de plus prêt et vous verrez que untel ne sourit pas vraiment à son voisin, mais plutôt à son petit ami derrière, et que de l’autre côté une autre personne ne rit pas mais semble plutôt exaspérée par l’attitude de ses « amis » et va s’empresser de trouver une excuse pour partir. Partir, certaines personnes ne rêvent que de ça à Coventry, mais en sont incapables, parce qu’elles sont nées ici, toute leur vie se trouve ici. D’autres y sont arrivés, mais pour quoi ? Pour revenir à la fin, et passer le reste de leur vie à Coventry. Je pense que je ferais pareil, je me plais ici, je suis entourée de personnes comme moi, et même d’autres créatures intéressantes. Et puis que serait une ville sans sa petite peste, son côté maléfique ? Rien, on ne vit pas au pays des nuages en barbapapa.

« Alors, comment c'est passer ta journée ? »

Ma journée ? Je crois qu’elle ne veut pas savoir. Pas une bonne journée quand on sait que le manoir tombe en ruine et que pour l’instant, j’y vis toute seule. Imaginez les travaux qu’il faut faire pour réparer un manoir vieux de 200 ans. Même en utilisant la magie, vous bouchez une fuite d’eau, pour en découvrir une autre, ainsi qu’un trou dans le toit et une marche d’escalier qui s’effondre. Passionnant n’est-ce pas ? Pourtant, j’aime bien y vivre dans ce manoir moi, il est à ma famille depuis un bout de temps, c’est chez moi quoi.

- Super ! dis-je ironiquement en finissant mon verre. Serre-m'en un autre s'il te plait. Et toi ?